dimanche 19 avril 2009

A quoi sert une inspection CHSCT ?

*A quoi sert une inspection CHSCT ?

(Sur votre site, vous dîtes qu’elles sont rares. Pourquoi ? Qu’apportent-elles pourtant, contrairement à la visite et à l’enquête ?)

Quels sont les motifs de son déclenchement ? (théoriques et pratiques)

Qui déclenche une inspection ? Doit-on avoir l’accord de la direction ? (Dans son déclenchement, dans sa réalisation pratique (entrer dans un bureau, dans un atelier, parler avec le personnel…))

 

Pour répondre efficacement à la question de savoir à quoi sert une inspection du CHSCT, nous devons replacer l’inspection du CHSCT dans le cadre des missions fondamentales de l’institution.

Le CHSCT est une institution représentative du personnel (IRP) comparable au Comité d’Entreprise (CE). Pour le CE, la loi précise clairement le fond des différentes missions. Ainsi l’article L2323-1 dispose que :

«  Le comité d'entreprise a pour objet d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production.

Il formule, à son initiative, et examine, à la demande de l'employeur, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail, d'emploi et de formation professionnelle des salariés, leurs conditions de vie dans l'entreprise ainsi que les conditions dans lesquelles ils bénéficient de garanties collectives complémentaires mentionnées à l'Article L911-2 du code de la sécurité sociale.

Il exerce ses missions sans préjudice des dispositions relatives à l'expression des salariés, aux délégués du personnel et aux délégués syndicaux ».

 

Pour le CHSCT, Institution Représentative du Personnel comme le CE, nous pourrions transposer ainsi  cet article :

« Le CHSCT a pour objet d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'amélioration des conditions de travail, à la protection de la santé et de la sécurité des travailleur au travail.

Il formule, à son initiative, et examine, à la demande de l'employeur, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail, les conditions de vie dans l'établissement ainsi que la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs d l’établissement.

Il exerce ses missions sans préjudice des dispositions relatives à l'expression des salariés, aux délégués du personnel et aux délégués syndicaux ».

 

Dans cette perspective du rôle fondamental de l’IRP, le code du travail précise (L4612-1) les trois grandes missions données au CHSCT :

1° Contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure ;

2° Contribuer à l'amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l'accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ;

3° Veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières.


 La délégation du personnel au CHSCT devra donc remplir ces trois grandes missions, avec sa particularité d’IRP, c’est-à-dire en permettant aux salariés  d’être informés et consultés, de contrôler et de faire des propositions alternatives ou d’amélioration, sur la politique santé et sécurité au travail, la politique d’amélioration des conditions de travail mise en place dans l’établissement.

 

Pour que le CHSCT contribue à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et pour qu’il contribue à l'amélioration des conditions de travail, le législateur fixe des tâches particulières à la délégation du personnel :

  • Procéder à l'analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs de l'établissement ainsi qu'à l'analyse des conditions de travail (L4612-2) ;
  • Susciter toute initiative qu'il estime utile. Proposer des actions de prévention (L4612-3) ;

 

Pour que le CHSCT veille à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières le législateur fixe à la délégation du personnel une tâche particulière :

  • Procéder, à intervalles réguliers, à des inspections (L4612-4).

 

L’inspection est donc une tâche particulière donnée par le législateur au CHSCT pour qu’il remplisse sa troisième grande mission : « Veiller à l’observation des prescriptions légales prises en ces matières ».

 

Enfin, le législateur fixe encore à la délégation du personnel  une tâche particulière qui pourra permettre à la fois à la délégation du personnel de contribuer à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, de contribuer à l'amélioration des conditions de travail, et de veiller à l'observation des prescriptions légales :

  • Réaliser des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel (L4612-5)

 

Pour l’accomplissement de chacune de ces tâches le CHSCT dispose de moyens différents. Toutes les tâches du CHSCT devront néanmoins être réalisées selon une unique méthode de travail propre au CHSCT : La mission confiée à ses membres.

 

Le code du travail précise en effet que le CHSCT  « définit les missions qu'il confie à ses membres pour l'accomplissement des tâches qui relèvent de sa compétence » (R4612-1). Le CHSCT définira ainsi des missions d’analyse de conditions de travail, des missions d’enquête suite à la constatation de risques professionnels, suite à accident du travail ou atteinte à la santé. L’inspection elle aussi devra donc être réalisée selon cette méthode de travail unique au CHSCT la mission définie par le CHSCT.

 

Le CHSCT est une institution consultative en ce qui concerne la politique Santé et Sécurité au travail de l’établissement ; délibérative en ce qui concerne les résolutions adoptées pour exprimer ses avis et propositions et en ce qui concerne son fonctionnement. Il décide, par vote à la majorité des membres présents,  ses modalités de fonctionnement et l’organisation de ses travaux (L4614-2). Sur les questions de fonctionnement le Président peut participer au vote, mais il n’a pas voix prépondérante. La majorité des membres présents a donc la charge de décider, dans le cadre de la loi, comment le CHSCT va fonctionner et comment ses travaux seront organisés. Le CHSCT est donc une institution délibérative notamment en ce qui concerne la définition des différentes missions qu’il doit confier à ses membres.

 

Pour la mission d’inspection, la loi impose un rythme précis : « La fréquence de ces inspections est au moins égale à celle des réunions ordinaires du comité » (L4612-4). La fréquence des réunions ordinaires de CHSCT est au minimum d’une par trimestre (L4614-7), le nombre d’inspections réalisées par le CHSCT doit aussi être au minimum une par trimestre.

 

Il reste encore aux membres du CHSCT la responsabilité de programmer effectivement des inspections, au moins à la fréquence prévue par le législateur et d’en définir la forme et le périmètre de façon précise.

 

*Comment doit-elle se dérouler ? (qui y participe en général, qui doit y participer ? Si la direction doit être présente, quel peut être son rôle ? Idem avec l’inspection du travail ? Combien de temps peut-elle durer ?)

Les salariés ont-ils obligation de répondre aux « inspecteurs » ? Peuvent-ils être sanctionnés pour ça par la direction ? Est-ce que ça s’est déjà vu ?

Un membre de l’encadrement peut-il empêcher l’accès à tel espace aux membres de ’inspection ?

 

Réalisée un inspection n’est pas une chose facile. Cela demande notamment une connaissance préalable des textes normatifs dont l’observation va être vérifiée. Dans la pratique observée, les membres des CHSCT font peu de véritable inspection, car souvent, il y a un amalgame entre différentes pratiques : l’audit sécurité, la visite, la tournée syndicale et l’inspection proprement dite. Chaque pratique a ses particularités, son intérêt propre, le CHSCT peut bien sûr participer à la réalisation d’audit de sécurité ou à des visites pour rechercher, avec les salariés, des propositions d’amélioration, mais ce que demande la législation c’est qu’il procède à des inspections.

 

Logiquement, il n’y a pas de forme prédéfinie pour réaliser une inspection de CHSCT.  C’est la majorité des membres présents lors d’une réunion de CHSCT qui en définira la forme en fonction des prescriptions dont l’observation devra être contrôlée. Par exemple, l’inspection effectuée pour veiller à l’observation des prescriptions normatives existantes en matière de prévention du risque incendie dans un bâtiment particulier, ne sera pas organisée, ni préparée, de la même façon que l’inspection relative à l’observation des prescriptions en matière de durée du travail.

 

Une constante dans l’inspection, c’est qu’en général elle est menée de façon contradictoire, c’est-à-dire en présence de l’employeur ou de son représentant. En effet, la non-conformité éventuelle doit être dûment constatée sans contestation possible. Cependant, si des pratiques peuvent être conseillées aux représentants du personnel, il n’y a pas de règles obligatoires ou préétablies à respecter.

 

Même si l’employeur ne participe pas à l’inspection (ce qui est assez peu fréquent), la date et le lieu de l’inspection auront obligatoirement été définis en réunion et des membres précisément  désignés pour l’effectuer. Personne ne pourra donc s’opposer à la libre circulation de ces représentants du personnel en mission CHSCT, sans commettre un délit d’entrave au fonctionnement régulier du CHSCT.

 

 

 

 

*Comment s’y préparer ? Les précautions à prendre.

Le temps de préparation et de réalisation de l’inspection elle-même est-il décompté sur les heures de délégation ou sur les heures de travail ?

Doit-on concentrer l’inspection sur un point particulier pour être plus efficace ? Peut-on le faire ?

Quelles sont les obligations de la direction ? Doit-elle fournir certaines informations, attribuer certains moyens pour qu’elle puisse se dérouler dans de bonnes conditions ?

Doit-on prévenir les salariés d’une inspection ?

Doit-on prévenir l’inspection du travail ?

 

Il est utile de se préparer avant de réaliser une inspection du CHSCT. Une inspection aura d’autant plus d’intérêt que les travailleurs concernés en sont demandeurs. Elle sera d’autant plus efficace qu’elle va s’inscrire harmonieusement dans l’activité et les priorités déjà définies par le CHSCT. La délégation du personnel fera bien de choisir le secteur et le thème de l’inspection avec précision.

Préparer une inspection, c’est donc dans un premier temps, choisir le secteur et le thème de l’inspection. Ensuite, il va falloir préparer avec les textes normatifs, quels points particuliers vont faire l’objet de notre attention, une liste de points à contrôler pourra donc être arrêtée par les représentants du personnel.

Par exemple, pour une inspection réalisée sur l’observation des dispositions réglementaires prises pour la prévention des risques d’exposition au bruit, la liste de points à contrôler pourrait commencer, pour l’article R4433-1, par le contrôle des points suivants :

  • Date de l’évaluation la plus récente et éventuellement la dernière mesure des niveaux de bruit auxquels les travailleurs sont exposés.
  • Par qui et comment (Un arrêté conjoint des ministres chargés du travail et de l'agriculture précise le mode de calcul de ces paramètres physiques) cette évaluation et éventuellement ce mesurage ont-ils été réalisés ?
  • D’après l’article R4433-1, l’évaluation et le mesurage ont pour but de déterminer les paramètres physiques utilisés comme indicateurs du risque et sont définis comme suit :

1° Le niveau de pression acoustique de crête est le niveau de la valeur maximale de la pression acoustique instantanée mesurée avec la pondération fréquentielle C ;

2° Le niveau d'exposition quotidienne au bruit est la moyenne pondérée dans le temps des niveaux d'exposition au bruit pour une journée de travail nominale de huit heures ;

3° Le niveau d'exposition hebdomadaire au bruit est la moyenne pondérée dans le temps des niveaux d'exposition quotidienne au bruit pour une semaine nominale de cinq journées de travail de huit heures.

Quelles valeurs ont-été obtenues pour chacun de ces paramètres physiques ?

 

  • Les valeurs d’exposition fixées à l'article R4431-2 sont-elles dépassées et si oui communication des résultats ?
  • Etc.

 

Bien sûr, si la mission d’inspection a été correctement définie en réunion et décidée à la majorité des membres présents, l’employeur à l’obligation (L4614-9) de fournir toutes les informations  nécessaires à la réalisation de cette mission d’inspection. Le même article (L4614-9) prévoit aussi que l’employeur doit donner aux représentants du personnel les moyens nécessaires à la préparation et à l'organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections. Les représentants du personnel doivent donc recevoir les informations et les moyens utiles à remplir cette tâche particulière que leur impose la loi.

 

Si au cours de l’inspection, des non-conformités avec les textes normatifs sont repérées, la délégation du personnel peut demander que l’employeur propose un calendrier de mise en conformité. En cas de désaccord, il est encore possible de saisir l’inspecteur du travail qui pourra le cas échéant, mettre en demeure l’employeur de prendre les mesures nécessaires.

 

*Combien d’inspection peut-on effectuer ? (Vous dîtes une par trimestre mais le code du travail parle lui d’intervalles réguliers, ou à une fréquence au moins égale à celle des réunions ordinaires) Peut-on en abuser ou doit-on au contraire éviter d’en faire une action ordinaire ?

 

Le nombre d’inspections qui doivent légalement être réalisées est donc au minimum d’une inspection de l’établissement par trimestre. En effet, il y au minimum une réunion ordinaire par trimestre. Mais pour réaliser cette inspection complète de l’établissement le CHSCT est libre de décider (L4614-2) de faire cette inspection secteur par secteur. C’est-à-dire que pour réaliser l’inspection de l’ensemble de l’établissement, il faudra réaliser plusieurs inspections sectorielles.

La difficulté rencontrée sur le terrain pour réaliser l’inspection trimestrielle de l’établissement vient en particulier du temps nécessaire à réaliser cette tâche.

En effet, l’article L4614-6 précise que le temps passé :

1° Aux réunions ;

2° Aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ;

3° A la recherche de mesures préventives dans toute situation d'urgence et de gravité, notamment lors de la mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent ;

Est également payé comme temps de travail effectif et n'est pas déduit des heures de délégation.

 

Mais cet article ne précise rien pour les inspections. La Cour de Cassation, chambre criminelle, Audience publique du mardi 17 février 1998, N° de pourvoi : 96-82118 (Publié au bulletin), a d’ailleurs précisée que l’inspection ne peut pas être assimilée à une réunion du CHSCT :

« Selon l’article L. 236-7, alinéa 5, du Code du travail, (article L4614-6 du nouveau code du travail) est payé comme temps de travail effectif sans être imputé sur le crédit d’heures attribué, en vertu de l’alinéa 1er du même texte, à chacun des représentants du personnel au CHSCT, le temps passé par ceux-ci aux réunions, aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave, ou à la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence ou de gravité. N’entre pas dans ces prévisions le temps consacré par ces salariés aux inspections périodiques effectuées en application de l’article L. 236-2, alinéa 3, du Code précité, (article L4612-4 du nouveau code du travail) lesquelles procèdent des missions ordinaires du comité, hors toute urgence ou gravité ».

 

Cependant, rappelons que l’article L4614-9 prévoit bien lui que l’employeur doit donner aux représentants du personnel les moyens nécessaires à la préparation et à l'organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections.

Nous pensons que les moyens liés aux déplacements imposés par les inspections comprennent normalement le temps nécessaire à ces déplacements, et que donc le temps passé en déplacement d’inspection doit bien sûr être payé comme temps de travail effectif sans être déduit des heures de délégation. Tous les employeur ne partageant pas cette analyse, ce point devra encore être précisé par la Cour de Cassation.

 

*Un compte-rendu doit-il être établi ? A-t-il une forme à respecter ? Doit-il être communiqué à la direction ? Si oui, quand et comment ?

En quoi les conclusions de l’inspection contraignent la direction ?

 

Le CHSCT décide donc lui-même quant, où et sur quoi va porter la mission d’inspection qu’il définit et confie à ses membres.

Il n’y a aucune règle prédéfinie qui déterminerait si un compte-rendu doit être fait et à qui il devrait être transmis. Les membres du CHSCT ont la responsabilité de définir eux-mêmes et de mettre en œuvre leurs propres modalités de fonctionnement et d’organiser leurs travaux pour qu’il soient le mieux possible adaptés au terrain. Cela est particulièrement vrai pour les missions d’inspection que le législateur leur demande d’effectuer.

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